En ce dimanche des malades et de la santé, la première lecture ainsi que l’Évangile nous évoquent une maladie très répandue dans l’antiquité, la lèpre. Cependant les deux textes que nous avons entendus, sont diamétralement opposés.
Dans le livre du Lévitique, il est surtout question d’écarter les lépreux du camp. Autrement dit de les éloigner afin d’éviter la propagation de la maladie. Cela peut être compréhensible, mais cela va malheureusement bien plus loin. En effet, ce n’est pas seulement une mesure d’hygiène, il s’agit aussi de les considérer comme des êtres impurs dont il faut se méfier. « Le lépreux atteint d’une tache (…) criera : “Impur ! Impur !” Tant qu’il gardera cette tache, il sera vraiment impur. » C’est la double peine. Malade, le lépreux est rejeté parce que considéré comme pouvant souiller les autres. Exclu de la communauté, on le considère également comme éloigné de Dieu.
Jésus remet l’homme debout
Dans l’Évangile de Marc, c’est tout le contraire. Jésus dépasse les peurs ancestrales mais aussi les jugements hâtifs, les condamnations implacables et même les interdits. Lui, est d’abord « saisi de compassion ». Contre toute attente, il étend la main autrement dit il s’approche et mieux encore il touche. Et puis il y a sa parole de salut : « Je le veux, sois purifié. » Il remet l’homme debout. Il replace l’homme au cœur de la société. Il ne voit donc pas un malade dangereux, un homme impur dont il faut éviter le contact, il voit un homme digne de respect, digne d’amour.
Aujourd’hui encore, nous connaissons tous, les nouveaux lépreux de notre société. C’est le sans-abri qui fait la quête devant le supermarché et qui nous insupporte. C’est le drogué qui nous fait les poches pour pouvoir s’acheter sa dose et que l’on va maudire. C’est l’ancien détenu qui n’arrive pas à trouver un travail parce qu’on pense qu’il est dangereux. C’est la personne âgée que l’on ne visite plus à l’EHPAD car elle radote. C’est le migrant que l’on regarde de travers en se disant qu’il ferait mieux de rester chez lui. La liste pourrait encore s’allonger.
Qui se fera le prochain?
Nous connaissons donc ces lépreux d’aujourd’hui. Mais qui se fera le prochain ? Qui – parce qu’il est disciple de Jésus-Christ –, ira à la rencontre du lépreux malgré les préjugés ? Nous avons de beaux exemples à travers la Croix-Rouge française, le Samu social ou bien la Société de Saint-Vincent-de-Paul qui font des maraudes et viennent en aide aux plus démunis. Ce sont aussi les soignants dans les hôpitaux qui ne regardent ni la couleur de peau, ni la religion, ni même l’hygiène de la personne et qui par leur dévouement, soignent et redonnent de la dignité. Alors, il est vrai que nous avons toutes les raisons de ne pas aider un S.D.F. : c’est un feignant, un pouilleux, un profiteur du système. C’est peut-être vrai. Cependant, il reste aux yeux de Dieu un fils, une fille. Nous-mêmes nous sommes feignants spirituellement, nous sommes pouilleux dans l’amour, des profiteurs de la grâce de Dieu. Et pourtant, pourtant Dieu continue à nous aimer. Regardons Jésus qui s’est laissé émouvoir par la détresse du lépreux. Et quand il l’a touché, il n’a pas été contaminé. À contrario, c’est le lépreux qui a été contaminé par le cœur aimant de Jésus. Le Christ lui a transmis la vie divine, qui guérit, qui redresse, qui rend la dignité.
Alors la question qui nous est posée est simple : Serons-nous de ceux qui excluent ? Ou bien serons-nous de ceux qui accueillent tout homme à la manière du Seigneur ? Qu’en ce dimanche de la santé notre cœur de pierre devienne cœur de chair afin que toute notre vie soit imprégnée de son amour et que nous puissions le communiquer à tous, en particulier aux plus fragiles.